La valeur essentielle du Mythos, par Jean-François Alizon

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Publié le 22 avril 2023

Jean-François Alizon est théologien et musicien, ancien président de l’association jungienne de Strasbourg, auteur du livre Jung et le christianisme, un regard neuf (2021 éd. Empreinte Temps Présent). Vous pouvez télécharger l’article complet en cliquant ici.

 

Il est des grandes familles d’esprit. Ceux d’Annick de Souzenelle et de Carl Gustav Jung sont faits de la même étoffe. Des visions fondatrices sont venues les relier dès leur jeunesse à la réalité profonde qui nous constitue. Et tous deux ont été confrontés à l’absurde, au désespoir, au fond du gouffre. C’est là, dans cette matrice obscure, qu’ils ont découvert le noyau de leur être profond, et la dimension divine de l’homme. Dans la construction de leur œuvre, ils ont puisé à cette source, restaurant ainsi une relation avec une expérience de la profondeur dont nos modes de pensée contemporains nous séparent.

Le premier ouvrage important d’Annick est intitulé Le symbolisme du corps humain. Jung, dès le début de son livre fondateur Les Métamorphoses de l’âme et ses symboles distingue clairement deux types de fonctionnement de l’esprit humain : le langage dirigé et le langage symbolique. Le premier est celui de la pensée rationnelle, où chaque mot a une signification univoque, pour permettre la communication avec autrui. Le second est le langage de l’âme, il est celui de l’humanité primitive, des rêves, des poètes et des enfants, où chaque mot ouvre sur l’infini des significations des images. Il est le langage des écrits sacrés, qui sont faits pour parler à l’âme et aux émotions. La lente construction de l’âme à partir des étages du corps que décrit Le symbolisme du corps humain est explorée à partir du symbole, qui porte la puissance du « Mi », le monde archétypal non manifesté, au « Ma », la multiplicité des différents niveaux de réalité. Comme pour Jung, pour qui le symbole surgi des profondeurs permet la réunion des deux pôles de l’être, conscient et inconscient.

Dès le 6e siècle avant notre ère, les Grecs avaient bien distingué le Mythos et le Logos, le premier prenant sa source dans le symbole, le second dans la pensée dirigée. C’est pourquoi, dans ce livre, le mythe soutient la démarche d’Annick à chaque instant. Elle montre comment chaque étape de la construction du psychisme de l’homme trouve sa signification dans les récits de la tradition orale de toute l’humanité. Elle fait largement usage de la mythologie grecque, en particulier, et fait preuve de virtuosité dans sa lecture. Par exemple, pour elle, les amours de Zeus et les interventions d’Hermès décrivent l’acquisition de notre identité divine dans la vie intra utérine. L’œuvre de Mircea Eliade, qui fut proche de Jung dans les rencontres d’Eranos, a été aussi pour elle une source d’inspiration. L’historien des religions a montré l’importance pour la constitution des communautés humaines des récits fondateurs qui donnaient place et sens à l’existence de l’homme, et le conduisaient dans les étapes de sa vie. Ces récits sont pour Eliade les modèles de l’intervention du monde divin dans la réalité actuelle et à venir.

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