Extrait de l’ouvrage d’Annick de Souzenelle Oedipe Intérieur (pages 177 – 179)
Tout dépend de ce que nous entendons par « laïcité ».
Venant du grec laos qui est le « peuple » donc le multiple, la laïcité joue en dialectique avec l’Un qui, Lui, est d’ordre divin. Respectivement Yin et Yang, selon la terminologie taoïste bien connue, ces deux pôles contiennent, respectivement aussi, une part Yang et une part Yin.
La laïcité restera totalement stérile si elle ne tient pas compte du divin ; le spirituel le restera de même s’il ne se met pas à l’écoute de la laïcité et ne s’implique pas en elle.
Au cours de l’Histoire, la laïcité s’est nécessairement opposée au divin dans la mesure où l’Occident ne vivait le divin que dans l’ordre extérieur des choses, à savoir dans les Eglises en tant qu’institutions campées sur leurs vérités.
Ce statisme autoritaire a généré, en saine réaction, une laïcité dynamique, vivante et qui se suffisait à elle-même dans un imperturbable « oubli de Dieu », voire un refus du Dieu des Eglises. Nous devons à cette dynamique les richesses incalculables qui ont considérablement joué dans l’évolution de l’Homme et de la société en ces derniers siècles.
La laïcité a obéi pour cela à des valeurs restées étrangères aux valeurs religieuses en place, mais peut-être plus axées qu’elles parfois dans le chemin de vérité ; dans l’ensemble, son éthique restait compatible avec la bonne morale que les Eglises ne savaient pas dépasser.
Il en est tout autrement de la situation actuelle.
Face aux problèmes de la modernité, les éthiques « humaines trop humaines » sont de part et d’autre d’une grande insuffisance. […]
La laïcité Yin ne pourra plus ignorer la dimension transcendante et Yang de l’Homme ni celle de la Création qu’il récapitule en lui ; elle devra tenir compte des lois ontologiques qui président à la vie. Les Eglises devraient être, devant elle, l’instance qui annonce la « Bonne Nouvelle », Bassorah en hébreu, c’est-à-dire Bassar, la « chair » ressuscitée, et dotée d’un visage aux yeux ouverts à ces lois.
Or, elles annoncent le Christ historique, sa mort et sa résurrection mais ne savent pas encore, avec Lui, mourir à elles-mêmes pour ressusciter et entrer dans l’intelligence de ces champs de vie nouveaux.
En tant qu’institutions saisies avec toutes les autres structures du monde dans les turbulences du cyclone […], les Eglises ne peuvent s’exclure du processus de mutation que celles-ci révèlent ; elles ont à mourir pour renaître. Leurs intégrismes respectifs vont à l’encontre même de ce qu’elles enseignent :
« Si le grain ne meurt, il ne peut porter de fruits. »
Si je fais référence aux Evangiles, c’est que je ne peux en effet parler que des Eglises chrétiennes que je connais.
Mais cette loi de mort-résurrection est universelle et ne peut épargner aucune des religions du monde.